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AFRIQUE
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Au Mozambique, le rap en bande-son des jeunes qui mènent la contestation
Au moins 90 personnes ont trouvé la mort dans les manifestations post-électorales, à l'appel du principal opposant Venancio Mondlane qui rejettent des résultats le donnant perdant face au parti Frelimo.
Au Mozambique, le rap en bande-son des jeunes qui mènent la contestation
Manifestation le mois dernier au Mozambique / Photo: Reuters
11 décembre 2024

En première ligne de la contestation secouant le Mozambique, le rappeur mozambicain Nikotina KF vient de braver les gaz lacrymogènes et les balles en caoutchouc de la police.

Echo de la jeunesse assoiffée de justice sociale de ce pays d'Afrique australe qui manifeste depuis plus de deux mois, l'artiste ne dénonce pas seulement, dans ses textes comme dans la rue, l'élection du 9 octobre "volée" à l'opposition.

"La question est sociale, plus que politique", affirme à l'AFP le musicien de 32 ans, boucle d'oreille et t-shirt à l'effigie de l'ex-basketteur américain Dennis Rodman, dans le quartier populaire de Mafalala. Son visage demeure marqué par la dispersion musclée des manifestants ce matin-là.

Au moins 90 personnes ont trouvé la mort dans les manifestations post-électorales, à l'appel du principal opposant Venancio Mondlane qui rejettent des résultats le donnant perdant face au parti Frelimo.

"Le peuple avait déjà la poudre, Venancio n'a fait qu'allumer la mèche", dit le rappeur, nommé Higino Fumo à l'état civil. "Les gens se rendent compte qu'un groupe possède beaucoup alors que la majorité n'a rien du tout. Ca crée des clivages".

Riche en ressources minières et gazières, le Mozambique compte près de trois quarts de sa population vivant dans la pauvreté, selon la Banque africaine de développement.

Sa jeunesse, davantage touchée par le chômage, représente une part écrasante du pays: environ deux tiers de ses 33 millions d'habitants ont moins de 25 ans, selon les Nations unies.

Tout son désespoir, démultiplié depuis les élections qui n'ont pas apporté leur promesse de changement, s'exprime dans la dernière collaboration de Nikotina, "Pray for Moz".

Dans le clip, il joue un vendeur de rue survivant en monnayant des miches de pain: "Tu veux gagner ta vie mais tu finis par la perdre quand un flic te tombe dessus", chante-t-il en portugais dans cette vidéo visionnée plus de 100.000 fois dans la semaine ayant suivi sa publication début décembre.

"Je peux mourir pour tout, mais je ne vivrai pas pour rien", lance-t-il dans un avertissement.

"Povo no poder"

"Je ne mobilise pas les jeunes à cause de Venancio", assure à l'AFP le rappeur. "J'utilise mon influence pour soutenir le droit fondamental de manifester qui figure dans la Constitution". Un point qu'il soulève dans son titre "Artigo 51 Uma Aula De Direito" ("Article 51 Une leçon de droit").

Son message et sa musique inspirent un grand nombre de fans qui l'arrêtent régulièrement dans la rue pour des autographes ou des selfies.

"Nous, les jeunes, on manque vraiment de travail", livre l'un d'eux, Zilton Macas, un coiffeur de 29 ans du quartier Maxaquene à Maputo, devenu un haut lieu de contestation.

"Ces dix dernières années, le Mozambique s'est transformé en une véritable fosse aux lions, où seules quelques personnes réussissent à survivre", estime-t-il.

Quelques mètres plus loin, le diplôme de gestion de l'environnement de Juvencia Bila, 43 ans, ne lui a pas ouvert d'autres portes que celles du fast food où elle est vendeuse.

"En grandissant, on est encouragés par ses parents à étudier pour avoir un meilleur avenir", explique-t-elle, coiffée d'une toque --celle de diplômée de l'université. "Mais ça n'a rien donné."

Figure publique de la contestation, Nikotina a fait l'objet de menaces, y compris de morts: "Non seulement à mon encontre, mais aussi celle de ma famille", affirme-t-il devant une fresque représentant Azagaia, un des rappeurs les plus respectés du pays et même du monde lusophone.

C'est à sa mort d'une crise d'épilepsie il y a près de deux ans, que Nikotina s'est décidé à user de sa musique pour des causes sociales. Une marche en la mémoire d'Azagaia, très critique du gouvernement, avait été dispersée à renfort de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc déjà.

Un de ses titres de 2008 a envahi les rues depuis deux mois: "Povo no poder" ("Le peuple au pouvoir") est devenu le slogan de la contestation.

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SOURCE DE L'INFORMATION:AFP
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