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SOCIÉTÉ ET CULTURE
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Falope Ibrahim se frotte à la réalité pour donner vie à son art
Le marché est autant une muse pour cet artiste nigérian qu'une référence au réalisme qui le ramène à son enfance, avec des images et des odeurs familières.
Falope Ibrahim se frotte à la réalité pour donner vie à son art
L'artiste nigérian est un expert dans l'art de capturer le rythme des scènes de marché. (Photo : Falope Ibrahim)
17 décembre 2024

Par Pauline Odhiambo

L'art de Falope Ibrahim ne cherche pas seulement à emmener le spectateur dans un voyage visuel dans le monde animé de son esprit.

Pour lui, la représentation d'un vendeur ambulant vendant ses produits dans l'agitation d'un marché africain typique n'est que la partie émergée de l'histoire.

Le public doit être amené à imaginer qu'il peut sentir l'odeur de la nourriture, sentir la chaleur du soleil sur son dos et entendre les bavardages tout autour.

À 29 ans, cet artiste nigérian est déjà un nom à prendre en compte dans le domaine du réalisme, imprégnant ses peintures du don rare de capturer les battements de cœur d'une scène.

Dans un tableau intitulé « While the Sun Shines », on voit une vendeuse se protéger de la chaleur de la journée en tenant le manche d'un parapluie ouvert sous son menton, tout en emballant des fruits pour un client qui attend.

L'imagerie visuelle est complétée par un sentiment de curiosité irrésistible qui incite le spectateur à vouloir en savoir plus sur elle.

"Je me promenais au marché un jour lorsque j'ai vu la vendeuse. La façon dont elle tenait son parapluie et sa tête inclinée pour maintenir la poignée en place m'ont rappelé des scènes que j'avais vues à maintes reprises sur le marché", raconte Falope à TRT Afrika.

"Avec sa permission, je l'ai prise en photo et j'ai ensuite recréé la scène sur la toile".

De près et de loin

Le terme « réalisme » dans l'art fait référence à la représentation précise, détaillée et sans fioritures de la vie contemporaine, rejetant l'idéalisation imaginative en faveur d'une observation minutieuse des apparences extérieures.

De nombreuses peintures à l'huile de Falope, y compris des portraits, sont fidèles à cet idéal.

Son œuvre au titre évocateur, "Si notre apparence définit qui nous sommes", montre un homme en état de contemplation, le motif de son chapeau à larges bords projetant des ombres captivantes sur son visage.

« Lorsque j'ai peint ce tableau, je pensais à la façon dont nos pensées et nos sentiments intérieurs peuvent être différents de ce que le monde extérieur perçoit de nous », explique Falope.

"Je remercie Dieu que nos corps ne soient pas faits de matériaux transparents, car cela pourrait nous rendre très vulnérables à bien des égards".

"À l'inverse, l'artiste pense que le fait de pouvoir voire les pensées des autres" pourraient peut-être rendre l'humanité plus sensible à la santé mentale collective.

"Il y a des gens qui ne savent pas comment s'exprimer, même lorsqu'ils ont besoin d'aide", a-t-il expliqué. "Tant de mauvaises choses pourraient être évitées si tout le monde pouvait voir clairement ce qui se passe en nous et intervenir positivement."

Au-delà de l'évidence

L'œuvre de Falope explore non seulement les personnes qui se cachent derrière les visages, mais aussi la façon dont leur quête d'espoir conduit parfois à des luttes plus importantes.

« The Seekers » explore la manière dont les fraudeurs escroquent souvent les Africains à la recherche d'une vie meilleure à l'étranger et les poussent à entreprendre des voyages périlleux.

Le tableau représente un homme à l'air abattu alors qu'il semble se trouver dans une ville développée où de nombreux migrants aspirent à travailler.

"Au Nigeria, certains jeunes sont sans emploi. Ils sont talentueux et ont des idées brillantes, mais ils n'ont pas de débouchés pour canaliser leurs idées et gagner un revenu, c'est pourquoi beaucoup d'entre eux cherchent constamment du travail à l'étranger", raconte Falope.

Son œuvre "The Tomorrow Dawn" évoque l'optimisme quant à l'avenir, tandis que "The Helping Hands" est un retour en arrière sur son enfance, lorsqu'il aidait souvent sa mère et sa grand-mère à vendre des marchandises sur le marché.

Le tableau représente un enfant en uniforme d'écolier devant des produits alimentaires mis en vente.

"J'ai passé tellement de temps avec ma mère et ma grand-mère à les aider, et ce sont des souvenirs que je chéris et que j'emporte toujours avec moi", confie-t-il à TRT Afrika.

"Elles m'ont inspiré pour commencer à créer des œuvres d'art qui représentent l'énergie du marché, et les expériences que j'ai partagées avec elles alimentent toujours l'art".

Clin d'œil aux héroïnes méconnues

Le tableau de Falope intitulé "Mama" est une belle reconnaissance des mères du monde entier qui travaillent sans relâche pour offrir de meilleures opportunités à leurs enfants.

"L'histoire de leur vie reflète le courage, la ténacité et l'amour inébranlable. Nombre d'entre elles renoncent à leurs désirs pour faire en sorte que les choses se passent bien pour leurs enfants", souligne Falope, se souvenant de son enfance.

"Enfant, je salissais mes cahiers en dessinant sur les marges, mais au lieu de me réprimander, ma mère m'achetait des cahiers pour dessiner", raconte-t-il à TRT Afrika.

"Lorsque j'ai grandi, mes parents ont soutenu ma décision d'étudier l'art et m'ont même créé un espace privé à la maison où je pouvais peindre sans être dérangé. Je fais de mon mieux pour qu'ils soient fiers de moi".

Ayant connu une ascension difficile, il conseille à tous ceux qui aspirent à se faire une place dans le domaine de l'art de persévérer, quoi qu'il arrive.

"Entraînez-vous constamment et soyez prêts à sacrifier beaucoup de temps et d'énergie pour votre art", dit Falope. "Ne sous-estimez pas votre talent ; faites-en sorte que votre art soit quelque chose qui puisse vous guérir et guérir les autres".

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SOURCE DE L'INFORMATION:TRT Afrika
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