Jacob Zuma a démissionné de son poste de président de l'Afrique du Sud en février 2018. / Photo : AP

La Cour constitutionnelle a d'abord entendu des arguments de l'avocat de M. Zuma qui demandait que des juges se récusent, en les accusant de partialité, ce qui a été rejeté par la cour.

M. Zuma, 82 ans, présent à l'audience, est à la tête d'un nouveau parti d'opposition (MK) qui cible notamment des électeurs déçus de l'ANC, le parti au pouvoir qui risque de perdre sa majorité parlementaire pour la première fois de son histoire lors des législatives du 29 mai.

Mais la commission électorale (IEC) avait fait valoir que Jacob Zuma, impliqué dans de multiples scandales de corruption, devrait être exclu du scrutin en raison d'une condamnation pour outrage en 2021.

La Cour constitutionnelle, à Johannesburg, est appelée à se prononcer après qu'un tribunal électoral a donné raison à M. Zuma en avril. Sa décision pourrait n'intervenir que la semaine prochaine.

Cette audience rend nombre d'observateurs nerveux. L'incarcération de M. Zuma en 2021 avait déclenché une vague inédite d'émeutes, qui ont fait plus de 350 morts. Beaucoup redoutent une redite de ce scénario catastrophe.

"Les partisans de Zuma ont menacé de recourir à nouveau à la violence si les choses ne vont pas dans leur sens", rappelle Zakhele Ndlovu, politologue à l'université de KwaZulu-Natal.

Dans le camp de l'ancien président, beaucoup considèrent la Cour constitutionnelle comme partisane.

C'est elle qui, en 2021, a condamné M. Zuma à 15 mois de prison après son refus systématique de témoigner devant une commission examinant la corruption à grande échelle sous sa présidence (2009-2018).

Besoin de "clarté"

La Cour est appelée à trancher sur l'interprétation d'une norme constitutionnelle interdisant à toute personne condamnée à plus de 12 mois de prison de siéger au Parlement.

La commission électorale a soutenu que cette disposition s'appliquait à M. Zuma. Mais les avocats de l'octogénaire ont plaidé avec succès devant le tribunal électoral que ce n'était pas le cas, car sa sentence avait été raccourcie par une remise de peine.

Ben Winks, avocat constitutionnaliste, estime "surprenante" la décision du tribunal électoral d'autoriser M. Zuma à être candidat, estimant que l'IEC disposait d'arguments solides pour faire appel.

"Les termes de la Constitution ne mentionnent pas la durée de la peine purgée", dit-il.

M. Zuma n'a passé qu'un peu plus de deux mois derrière les barreaux, bénéficiant d'une libération conditionnelle pour raison de santé, puis d'une remise de peine.

Son nouveau parti, uMkhonto we Sizwe (MK), a créé la surprise en devenant une force politique pivot en seulement quelques mois, certains sondages lui attribuant plus de 8% des intentions de vote.

S'appuyant sur la popularité de son dirigeant charismatique, il devrait grignoter les voix de l'ANC, dont M. Zuma a été un pilier pendant des décennies. Si l'ANC perdait sa majorité parlementaire, il serait contraint de former un gouvernement de coalition pour se maintenir au pouvoir.

Lors de son appel, l'IEC avait assuré n'avoir aucune intention de "s'immiscer dans le jeu politique", cherchant seulement de la "clarté" sur l'interprétation du passage de la Constitution interdisant la candidature de personnes condamnées, pour assurer des élections "libres et équitables" .

Dans les documents déposés au tribunal, elle explique que si M. Zuma était déclaré inéligible, cela n'affecterait pas la logistique du scrutin.

Le nom de M. Zuma figurerait toujours sur les bulletins du MK, ce qui éviterait une réimpression, mais il ne serait pas considéré comme élu à l'issue du scrutin.

AFP