L'opposition togolaise demande à la Cour de la CEDEAO de bloquer les réformes controversées. Photo : Reuters

Les partis d'opposition du Togo ont déposé une plainte auprès d'un tribunal ouest-africain pour tenter d'annuler une réforme constitutionnelle qui, selon eux, permet au président Faure Gnassingbé d'étendre son emprise sur le pouvoir.

L'amendement, qui fait passer le pays d'un système présidentiel à un système parlementaire, a alimenté les tensions politiques à l'approche des élections législatives du 29 avril.

Les législateurs ont adopté la réforme en mars, puis en seconde lecture en avril. Mais l'opposition estime que le parlement a déjà perdu son mandat parce que les élections ont été reportées au-delà de son mandat actuel.

Dans une plainte déposée auprès de la Cour de justice de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), 13 partis et groupes d'opposition ont demandé à la Cour de condamner le gouvernement pour violation de la démocratie et de la bonne gouvernance, selon le document vu par l'AFP jeudi.

Le consensus politique

La plainte demande à la Cour de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest de "retirer la loi de modification constitutionnelle".

Elle affirme que la réforme a été "faite en l'absence de tout débat public préalable et sans consensus politique" et que l'opposition a vu ses droits violés par l'État togolais.

Les autorités ont empêché les partis d'opposition d'organiser des manifestations contre les réformes.

Un porte-parole de la Cour de la CEDEAO a confirmé que la plainte avait été déposée.

La présidence à caractère symbolique

Les critiques considèrent cette réforme comme la dernière mesure prise par M. Gnassingbé, déjà au pouvoir depuis 2005, pour étendre le contrôle de sa famille sur le Togo, qui dure depuis plus de cinq décennies. L'armée l'avait désigné pour succéder à son père, qui avait lui-même régné pendant près de 40 ans.

Bien que l'opposition qualifie les réformes de "coup d'État institutionnel", les représentants du parti au pouvoir affirment que le système parlementaire renforce la démocratie au Togo.

En vertu de la nouvelle constitution, la présidence deviendra un rôle largement symbolique, élu par les législateurs pour un mandat de quatre ans.

Le pouvoir reviendra à un nouveau président du conseil des ministres, une sorte de poste de premier ministre : l'opposition estime que c'est juste une astuce pour contourner la limitation du nombre de mandats présidentiels.

Ce poste sera automatiquement occupé par le chef du parti majoritaire au parlement.

La CEDEAO au pied du mur

M. Gnassingbé est l'actuel chef du parti au pouvoir, l'Union pour la République (UNIR), qui domine le parlement.

Mercredi, la Cour constitutionnelle du Togo a rejeté une requête déposée par deux partis d'opposition contre la réforme.

La CEDEAO a vu son influence régionale sapée récemment, trois de ses États membres étant désormais dirigés par des gouvernements militaires à la suite de coups d'État. Le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont également quitté le groupe.

En décembre, la CEDEAO a exigé du régime militaire nigérien qu'il libère et rétablisse dans ses fonctions le président Mohamed Bazoum, détenu depuis qu'il a été renversé par un coup d'État en juillet. Mais le gouvernement militaire a refusé.

AFP