Rached Ghannouchi, leader du parti Ennahda, salue ses partisans lors d'un événement de campagne à Tunis / Photo : Reuters

‘’Ce jour marque le premier anniversaire de l'arrestation de Rached Ghannouchi, éminent penseur islamique, président d’un parlement légitime et chef de file du mouvement Ennahdha, la plus grande formation politique du pays’’, ont déclaré les soutiens de Ghannouchi par voie de communiqué dont Anadolu a obtenu copie.

Le communiqué ajoute que l’ex-président du Parlement (accusé de complot contre la sûreté de l’État) est âgé de 82 ans, ‘’ce qui en fait l'un des prisonniers d’opinion les plus âgés du monde arabe et de la région’’.

Les autorités tunisiennes ont procédé depuis le 11 février 2023, à des arrestations, ouvert des enquêtes ou engagé des poursuites contre plusieurs personnalités issues du monde politique, des médias et des affaires.

Le président tunisien Kaïs Saïed a accusé certains des prévenus d’être impliqués dans un complot contre la sûreté de l’Etat, les tenant, en outre, pour responsables de la pénurie des produits de base et de la flambée des prix. Des accusations toutefois rejetées par l’opposition.

À maintes reprises le dirigeant tunisien a insisté sur l'indépendance du pouvoir judiciaire, mais l'opposition l'accuse d'instrumentaliser la justice pour traquer ceux qui rejettent les mesures d'exception qu’il avait déclarées dès le 25 juillet 2021.​​​​​​​​​​​​​​

Le comité international de soutien a rappelé dans son communiqué les circonstances de l’arrestation du responsable en chef d’Ennahdha.

‘’Le 17 avril 2023, les forces de sécurité ont fait irruption dans le domicile de Ghannouchi, après l’avoir encerclé, et ce, sans aucun égard au statut et à l’âge du maître des lieux’’, indique le communiqué.

Et d’ajouter : ‘’Ghannouchi a été conduit vers un centre de détention inconnu, alors qu’il ne disposait pas d’avocat pour le défendre (…) Il a été soumis à un interrogatoire long et humiliant, à la suite de sa prise de parole lors d’une conférence-débat organisée par le Front de salut national, une coalition de l’opposition’’.

L’ex-président du Parlement avait exprimé lors de son intervention son ‘’rejet du coup d'État qui a entraîné la dissolution du Parlement ainsi que la suspension de la Constitution, perturbé les institutions, et donné les pleins pouvoirs à Kaïs Saïed.’’

Rached Ghannouchi avait évoqué également ‘’les dangers de l’exclusion sur le champ politique national’’, selon le communiqué.

Le communiqué condamne ‘’ l’incarcération de personnalités de renom, dont des dirigeants de partis, des magistrats, des avocats, des militants politiques, des syndicalistes et des activistes de la société civile, ainsi que le recours à des décrets arbitraires (décret-loi n° 2022-54 du 13 septembre 2022) contre des journalistes, des blogueurs et autres, dans le but d'étouffer la liberté d’opinion et d’expression.’’

‘’Ces faits ont poussé Ghannouchi à boycotter les séances d’interrogatoire en raison de son manque de confiance en l'institution judiciaire, et à considérer son arrestation comme étant éminemment politique, et que sa libération est tributaire d’une décision politique’’, ajoute le communiqué.

Lundi soir, Saïed a appelé l’appareil judiciaire à juger rapidement les personnes accusées de ‘’ complot contre la sûreté de l’État.’’

Le comité international de soutien au leader d’Ennahdha, veut ‘’la libération sans condition de Ghannouchi, la levée de l’injustice dont il fait l’objet, l'annulation des décisions judiciaires à son encontre et le restauration de sa réputation de figure intellectuelle et politique.’’

Début février 2024, Rached Ghannouchi, avait été condamné à une peine de trois ans de prison pour le ‘’financement illégal’’ de sa formation politique.

Le 15 mai 2023, le président fondateur du mouvement Ennahdha avait été condamné à un an de prison pour ‘’apologie du terrorisme’’ dans le cadre d'une autre affaire, à la suite d’une plainte l’accusant d’avoir traité les policiers de ‘’tyrans’’, selon des médias locaux. Un tribunal tunisien avait durci en appel la peine à 15 mois de prison ferme.

Le comité exhorte également les organisations de défense des droits de l'homme et organismes humanitaires du monde entier à ‘’exercer une pression maximale sur les autorités tunisiennes pour qu'elles libèrent les prisonniers d'opinion et respectent les conventions internationales’’.

Aucun commentaire n’a été émis dans l'immédiat par les autorités tunisiennes sur le communiqué du comité.

Le communiqué a été signé par 61 personnalités politiques et intellectuelles, dont l'ancien président tunisien Mohamed Moncef Marzouki, les anciens premiers ministres marocains Abdel-Ilah Benkiran et Saad Eddine El Othmani et l'ancien premier ministre libyen Moustapha Abou Chagour.

Outre Tarek al-Hachémi, ancien vice-président irakien, Zwelivelile Mandla Mandela, membre du Parlement sud-africain, petit-fils du président Nelson Mandela, et Richard Falk, ancien rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés.

Au cours de l’année 2023, la police a arrêté plus de 20 personnalités politiques de premier plan, dont le leader du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi, qui a été condamné par le tribunal tunisien de première instance à trois ans de prison, pour financement illicite par une partie étrangère.

Entre autres personnalités poursuivies, des figures politiques telles que Jawhar Ben Mbarek (membre du Front de salut national), Issam Chebbi (secrétaire général du Parti Al Joumhouri), Abdelhamid Jlassi (ancien leader du mouvement Ennahdha), Ghazi Chaouachi (Secrétaire général du Courant démocrate et ancien ministre), Khayam Turki (ancien leader du parti Ettakatol) et Ridha Belhaj (ancien chef de cabinet présidentiel), qui font face à des accusations de “complot contre la sécurité de l’État”, ce que l’opposition tunisienne dément.

AA