On estime que 850 millions d'Africains utilisent du charbon de bois. / Photo : TRT Afrika

Bien avant que les avions gros porteurs ne rétrécissent les distances à travers le monde et que le changement climatique ne devienne une préoccupation mondiale, il y avait presqu'un décor romanesque à voir les conducteurs de train transporter du charbon dans le foyer d'un moteur à vapeur, tandis que ce train sifflait en traversant des paysages bucoliques, projetant de la fumée dans un paysage verdoyant.

En réalité, le charbon, l'une des plus anciennes sources d'énergie au monde, est aussi l'un des principaux émetteurs de dioxyde de carbone, représentant 40 % des émissions responsables du réchauffement de la planète.

En revanche, son accessibilité et son utilité dans l'industrie font qu'il semble difficile de s'en passer.

Le charbon écologique ou vert est une source d'énergie alternative qui est à l'origine d'une révolution écologique et économique dans certaines régions d'Afrique.

Pour faire son poisson à la braise, Ousmane Doumbia qui s'essaie à la cuisine le weekend, dit utiliser du charbon de bois dont le sac coûte en moyenne 2500 FCFA au Mali, son pays. '' J'utilise le charbon de bois pour avoir une saveur, un fumet qui me rappelle un peu le poisson que je consommais à certaines occasions dans mon village, explique-t-il depuis la capitale Bamako à TRT Afrika.

Comme Ousmane, 850 millions d'Africains utilisent le charbon de bois.

Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), la demande mondiale de charbon atteindra 8,53 milliards de tonnes en 2023. Photo : TRT Afrika

Un problème mondial

Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), la consommation annuelle de bois de chauffage ou de charbon de bois est proche d'un mètre cube par personne en Asie du Sud-Est, en Afrique, dans les pays au sud du Sahara et en Amérique du Sud. Ce chiffre diminue dans les pays où les forêts se raréfient.

En ce qui concerne la consommation de charbon industriel - souvent sédimentaire - le secteur de l'électricité est le principal utilisateur. L'Agence internationale de l'énergie (AIE) indique qu'en 2023, la demande mondiale de charbon atteindra 8,53 milliards de tonnes.

L'ampleur de la consommation augmente alors que l'industrie et les scientifiques s'accordent à dire que la consommation de charbon est responsable de près de 40 % des émissions de dioxyde de carbone qui contribuent au réchauffement de la planète.

Dans ce contexte, Armel Kaboré, consultant agricole basé au Burkina Faso, est convaincu du potentiel économique et environnemental du charbon vert.

"On ne peut pas parler de charbon vert ou de charbon écologique sans parler de biochar, car les briquettes de charbon vert sont produites à partir de biochar. Après la pyrolyse de ces matières premières, on obtient du biochar, qui peut être utilisé en agroécologie comme engrais", explique-t-il à TRT Afrika.

Des avantages multiples

Le biochar a plus de sept fonctions dans le sol, dont la régulation du pH, une mesure de l'acidité ou de l'alcalinité. Il augmente également la rétention d'eau dans le sol et fournit à la plante les éléments minéraux dont elle a besoin.

Le charbon vert, ou charbon écologique, est l'aboutissement des travaux de l'entrepreneur kenyan Tom Osborn.

Le charbon est également l'un des principaux émetteurs de dioxyde de carbone, représentant 40 % des émissions responsables du réchauffement climatique. Photo : TRT Afrika

"L'idée de cette création est née de son observation des risques sanitaires encourus par les membres de sa communauté lorsqu'ils cuisinent avec du charbon de bois", explique M. Kaboré, qui a connu la même situation pendant son enfance dans le village de Koudiéré, à quelques kilomètres de la capitale, Ouagadougou.

Osborn s'inquiétait de voir sa mère "inhaler de la fumée tous les jours et finir par souffrir d'infections respiratoires causées par les particules de bois brûlées".

Kaboré estime que la production à grande échelle de charbon écologique n'est pas arrivée trop tôt. Les sources sont des déchets biodégradables tels que la paille, le papier, le carton, la cellulose, le bois et les algues, qui subissent tous une pyrolyse ou une thermolyse (décomposition par la chaleur).

Exposés à des températures élevées, ces déchets biodégradables se décomposent et forment des résidus organiques qui sont ensuite moulés, souvent avec de l'eau, avant d'être séchés.

Ce processus prend du temps et dépend fortement de la température. Même une fois le moulage terminé, il suffit d'une simple pluie pour que tout redevienne de la cendre. Malgré cela, le charbon écologique est une idée qui a fait son chemin.

Le charbon écologique est meilleur que le charbon conventionnel. Un point c'est tout. C'est un charbon qui ne dégage pas de fumée. Il s'allume plus rapidement que le charbon ordinaire et il est plus économique", affirme M. Kaboré.

La bataille pour l'acceptation

Chaque année, le Burkina Faso organise des journées nationales de reboisement pour s'assurer que le pays dispose d'un couvert végétal décent. Ce sont ces mêmes bois qui sont coupés pour produire du charbon de bois.

Le charbon de bois écologique ne dégage pas de fumée. Photo : TRT Afrika

"Pour que les gens puissent cuisiner, il faut qu'il pleuve pour produire des cultures et des céréales. Donc, si nous coupons les arbres, nous risquons de ne pas avoir de pluie. Nous aurons notre charbon de bois ordinaire, mais nous n'aurons pas de repas à cuisiner", explique Kaboré à TRT Afrika.

Depuis 2019, Kaboré apporte sa pierre à l'édifice grâce à des campagnes de sensibilisation et à la formation qu'il dispense sur les techniques de fabrication du charbon vert. Avec une vision qui va au-delà du Burkina Faso, il a fondé "Nature Afrique" pour conduire le changement.

"C'est un travail d'équipe. Nous menons des formations in situ : dans un champ, sur la route et avec les populations cibles, notamment les ménages ruraux et les agriculteurs", explique M. Kaboré.

TRT Afrika