Les files d'attente de voyageurs tenant des formulaires papier aux guichets d'immigration de Mogadiscio appartiennent désormais au passé.
Depuis le 1er septembre, la Somalie a entièrement basculé vers un système numérique de visas électroniques (e-visas) et d'autorisations de voyage électroniques (ETA), marquant ainsi la réforme la plus importante de son système d'immigration depuis 1960.
Ce nouveau système, accessible via le portail officiel du gouvernement, met fin à des décennies de demandes sur papier et à des procédures chaotiques de visas délivrés à l'arrivée.
Le système d'immigration somalien reflète l'histoire politique du pays. Après son indépendance en 1960, la Somalie a maintenu un système de contrôle des frontières fonctionnel, bien que perfectible, pendant trente ans.
Ce système s'est effondré entre 1990 et 2007, alors que la guerre civile dévastait les institutions gouvernementales et entraînait la fermeture des bureaux d'immigration.
Sans autorité centrale pour réguler l'immigration, traverser les frontières relevait du hasard et des circonstances.
La reprise a commencé en 2007, lorsque le gouvernement de transition a rouvert les bureaux d'immigration, avec pour objectif initial de rétablir des contrôles de base.
Entre 2014 et 2021, la Somalie a introduit des règles de documentation plus strictes pour les étrangers, afin d'aligner sa politique d'immigration sur les normes internationales. Ce processus a été affiné au cours des quatre années suivantes, ouvrant la voie à la transition numérique.
Un cadre de sécurité
Le système d'e-visas transforme fondamentalement le contrôle des frontières en Somalie. Les voyageurs ne peuvent plus obtenir de visas à l'arrivée via un processus autrefois opaque et désorganisé.
Toutes les demandes de visa doivent désormais être soumises en ligne avant le départ. Les compagnies aériennes risquent de lourdes sanctions si elles embarquent des passagers sans visas numériques valides.
Le processus se déroule en trois étapes – vérification, approbation et délivrance – chacune prenant un maximum de 24 heures. Les voyageurs reçoivent leurs visas en un à trois jours, remplaçant l'ancien système papier, lent et sujet à des failles potentielles de corruption.
« Nous utilisons ce système pour nous assurer que personne n'entre ou ne quitte le pays sans être contrôlé, et sans que nous ayons leurs informations », déclare Mustafa Duhulow, Directeur général de l'Agence somalienne de l'immigration et de la citoyenneté.
« Nous avons également mis en place un système mondial, avec 108 employés formés, qui est l'un des meilleurs systèmes au monde », ajoute-t-il.
Les avantages globaux du nouveau système vont au-delà de la commodité. En exigeant que les voyageurs déclarent leur motif de visite 24 heures à l'avance, les autorités disposent de données préalables sur qui entre et pourquoi.
Les experts estiment que cela est essentiel pour lutter contre le terrorisme, la traite et la criminalité transfrontalière.
« Nous veillons à ce qu'aucun voyageur illégal ne quitte la Somalie, et qu'aucun voyageur illégal n'y entre. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos partenaires internationaux et nous progressons beaucoup », affirme Duhulow.
« En tant que partie des agences de sécurité, nous travaillons très dur pour nous assurer qu'aucun membre d'Al-Qaïda, de Daesh ou d'Al-Shabab n'entre ou ne quitte le pays », ajoute-t-il.
Transparence financière
Les paiements en espèces aux postes-frontières aggravaient les problèmes habituels d'inefficacité, de vol et d'absence de responsabilité.
Le système d'e-visas garantit que tous les paiements sont effectués directement sur le compte du ministère des Finances de manière électronique.
« C'est un moment de fierté et de joie pour la Somalie, alors que nous franchissons une étape historique pour renforcer notre sécurité intérieure », estime Abdullahi Sheikh Ismail Fartaag, ministre somalien de la Sécurité intérieure.
« Le nouveau système exige que tous les voyageurs déclarent le motif de leur visite au moins 24 heures à l'avance, donnant à notre gouvernement les informations nécessaires pour protéger le pays plus efficacement. »
Infrastructure d'identité
Les demandeurs de passeports somaliens doivent désormais posséder une carte d'identité nationale, une exigence introduite pour corriger les registres de citoyenneté et sécuriser les documents de voyage.
Dans un pays où le suivi des identités s'est avéré presque impossible, relier les passeports aux cartes d'identité nationales représente un véritable progrès vers ce que les responsables appellent « un État fonctionnel ».
Un e-visa n'est pas seulement une question de commodité ; il s'agit de garantir la sécurité nationale, de protéger les données sensibles et de donner à la Somalie un meilleur contrôle de ses frontières. Ce système est une étape importante vers un avenir plus sûr et plus sécurisé.
Les responsables présentent le lancement de l'e-visa comme « un moment de fierté pour la Somalie » que Duhulow estime être le déclencheur de changements plus larges.
« J'exhorte tous les Somaliens à ne pas craindre ces réformes, mais à les considérer comme une réussite nationale », dit-il.
L'e-visa apporte plus que des améliorations en matière de sécurité.
Il montre aux investisseurs et aux partenaires que la Somalie prend la gestion des frontières au sérieux, valorise la transparence et souhaite mener ses affaires correctement.
