À l’approche de la 30e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP30), prévue à Belém, au Brésil, l’Afrique se présente avec un message sans équivoque : « L’ambition de l’Afrique n’est pas en question, ce qui manque, c’est la mise en œuvre ». C’est ce qu’indique un nouveau rapport du centre de réflexion kényan Power Shift Africa (PSA), intitulé « Priorités africaines pour la COP30 : note d'orientation ».
Dix ans après l’Accord de Paris, le continent continue de subir des impacts climatiques immédiats et dévastateurs — sécheresses, inondations et élévation du niveau de la mer — alors qu’il ne représente que moins de 4 % des émissions mondiales.
Cette COP, présentée comme la première “COP de la mise en œuvre”, représente un enjeu crucial pour l’Afrique, qui réclame des actions concrètes, un financement réel, une transition juste et une reconnaissance particulière de ses vulnérabilités. Le continent exhorte les pays les plus riches à tenir leurs promesses avant que la fenêtre d’action ne se referme.
Des besoins croissants, des fonds limités et un appel à l’équité
Ces dernières années, l’Afrique a progressivement gagné du terrain sur la question du financement climatique.
Lors de la COP26 à Glasgow, les négociateurs africains ont obtenu l’engagement de doubler les financements pour l’adaptation et d’inscrire la transition juste à l’ordre du jour officiel.
À la COP27 de Charm el-Cheikh, leur mobilisation a permis la création du Fonds pour les pertes et les dommages, une avancée historique.
Les besoins d’adaptation du continent sont estimés à 70 milliards de dollars par an, mais l’Afrique n’a reçu que 14,8 milliards en 2023.
Les pertes et les dommages devraient coûter entre 290 et 440 milliards de dollars entre 2020 et 2030, selon le rapport du PSA.
En se rendant à Belém, les pays africains demandent un triplement des financements pour l’adaptation et la mise en place d’un mécanisme transparent pour évaluer les besoins au-delà de 2030.

Le rapport recommande également la création d’un plancher minimal de financements sous forme de dons, dédiés à l’adaptation et aux pertes et aux dommages, estimant que les financements publics non générateurs de dettes sont essentiels pour un continent déjà durement touché par la crise climatique.
Une transition juste fondée sur l’innovation et l’inclusion
L’un des sujets clés de la COP30 sera le programme de travail sur la transition juste, visant à garantir que l’action climatique soit équitable, inclusive et protectrice des emplois et des communautés.
Un autre point majeur concernera le Programme de mise en œuvre des technologies (TIP), qui doit aider les pays en développement à accéder aux technologies nécessaires pour réduire les émissions et s’adapter au changement climatique.
Pour l’Afrique, la transition juste ne signifie pas seulement fermer les industries polluantes, mais étendre l’accès à l’énergie, favoriser la croissance industrielle, créer des emplois décents et renforcer la résilience.
Le rapport souligne que les transitions doivent être justes et soutenues par un financement équitable, des institutions solides et des mécanismes transparents.
Les pays africains plaident aussi pour des technologies climatiques accessibles et abordables, adaptées aux réalités locales. Ils demandent la levée des barrières liées aux brevets, le soutien à la production régionale et la promotion de l’innovation locale, afin que le continent devienne producteur, et non simple consommateur, de technologies propres.
Pour des règles équitables, une responsabilité juridique et une reconnaissance spéciale Face à la multiplication des mesures commerciales unilatérales liées au climat, comme le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières et le règlement européen sur la déforestation, le PSA met en garde contre le risque de voir l’action climatique se transformer en instrument de pression économique.
Passer des promesses aux actions concrètes
L’organisation appelle les pays africains à exiger que ces questions soient inscrites officiellement à l’ordre du jour de la COP30, et non reléguées à des discussions parallèles.
Par ailleurs, l’Afrique souhaite faire reconnaître la nécessité de mettre en œuvre l’article 9.1 de l’Accord de Paris, qui oblige les pays développés à fournir des ressources financières pour aider les pays en développement à atténuer et à s’adapter aux effets du changement climatique.
Le rapport rappelle qu’un avis consultatif récent de la Cour internationale de justice a réaffirmé cette obligation, renforçant la position africaine selon laquelle les promesses doivent se traduire par des actions concrètes.
Enfin, le PSA renouvelle l’appel à une reconnaissance formelle des “besoins et circonstances particuliers” de l’Afrique dans le cadre de la Convention climat.
Bien que le continent soit le moins responsable des émissions mondiales, il subit les pires conséquences, notamment l’insécurité alimentaire, le stress hydrique, les risques sanitaires et les perturbations économiques.
Le rapport conclut que la COP30 doit inscrire ces vulnérabilités africaines dans les décisions relatives au financement, à la technologie et au renforcement des capacités.













