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AFRIQUE
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Le plus grand moteur de développement inexploité de l'Afrique : sa diaspora
Plus de 170 millions de personnes d'ascendance africaine forment une vaste diaspora riche en ressources, mais leur potentiel reste largement inexploité.
Le plus grand moteur de développement inexploité de l'Afrique : sa diaspora
La diaspora africaine est un moteur de développement qui pourrait transformer le continent financièrement, intellectuellement et culturellement. Photo : Adobe
il y a 16 heures

Par Sunny Ofehe

L'histoire du développement de l'Afrique est souvent racontée à travers des lentilles familières : aide étrangère, prêts et réformes gouvernementales. Mais le moteur de croissance le plus puissant et le moins reconnu du continent n'est pas à l'intérieur de ses frontières. Il se trouve à l'étranger.

Plus de 170 millions de personnes d'origine africaine forment aujourd'hui une vaste diaspora riche en ressources et en compétences. Pourtant, son potentiel demeure en grande partie inexploité. Traditionnellement, leurs contributions ont été réduites aux seules remises de fonds. Mais aujourd'hui, la réalité est plus vaste : sur les plans financier, intellectuel et culturel, la diaspora africaine est un moteur de développement qui pourrait transformer le continent.

Considérons l'ampleur des remises de fonds. Selon la Banque mondiale, l'Afrique subsaharienne a reçu 49 milliards de dollars en 2021. D'ici 2024, les estimations suggèrent que ces flux ont presque doublé, atteignant 95 milliards de dollars, dépassant l'aide étrangère dans plusieurs pays. L'Égypte (22,7 milliards de dollars) et le Nigeria (19,8 milliards de dollars) figurent parmi les plus grands pays récipiendaires au monde.

Les familles dépendent de cet argent pour la nourriture, les frais scolaires, les soins médicaux et le logement. Pourtant, la seule consommation ne peut pas construire des économies. Rediriger ne serait-ce qu'une fraction de ces flux vers des investissements productifs pourrait profondément modifier la trajectoire de développement de l'Afrique.

La Banque africaine de développement souligne la nécessité de cadres d'investissement clairs, de la réduction des barrières réglementaires et de véhicules financiers transparents qui transforment les liens émotionnels en actions économiques. Le défi n'est pas le manque de volonté, mais l'infrastructure.

Le capital intellectuel est une autre dimension essentielle. La soi-disant « fuite des cerveaux » africaine a longtemps été décrite comme une perte. Mais des recherches récentes incitent à changer de perspective.

Une étude de 2023 publiée dans World Development Perspectives met en avant la « circulation des compétences », où des professionnels de la diaspora contribuent via des consultances de courte durée, du mentorat virtuel, des partenariats universitaires et des missions sectorielles spécifiques sans se relocaliser définitivement.

Les retours temporaires ou les collaborations transfrontalières apportent savoir, technologie et innovation, renforçant la gouvernance locale, les institutions et les efforts de modernisation. Les gouvernements africains peuvent libérer ce potentiel en simplifiant les procédures d'accréditation, en reconnaissant les qualifications étrangères et en établissant un Corps des compétences de la diaspora pour déployer des expertises dans les secteurs prioritaires.

La dimension entrepreneuriale est tout aussi convaincante. Les entrepreneurs de la diaspora africaine comprennent les marchés locaux tout en naviguant dans les économies occidentales, asiatiques et du Moyen-Orient. Ils sont des passerelles naturelles reliant les entreprises africaines aux chaînes d'approvisionnement mondiales, aux marchés d'exportation et aux réseaux d'investissement. Pourtant, de nombreux pays rendent inutilement difficile pour leur diaspora d'investir ou de créer des entreprises.

Des procédures de double citoyenneté lentes, des formalités d'enregistrement des sociétés lourdes et des lois sur l'investissement obsolètes créent des barrières là où des ponts devraient exister. Des cellules d'appui aux entreprises de la diaspora dans les ambassades, des parcours de citoyenneté harmonisés et des incitations ciblées à l'investissement pourraient déclencher un boom entrepreneurial à travers le continent.

L'influence culturelle est un autre domaine où la diaspora est déjà en tête. L'afrobeat domine les classements musicaux mondiaux. Nollywood, l'industrie cinématographique nigériane, est désormais la deuxième en volume de production au monde. Des créateurs de mode africains font la une des podiums de Paris, Milan et New York. Les communautés de la diaspora amplifient ces industries, élargissant les marchés internationaux tout en renforçant le soft power de l'Afrique.

Selon des recherches de la Friedrich-Ebert-Stiftung, l'engagement de la diaspora est essentiel pour le commerce transnational de biens culturels et pour renforcer l'image mondiale de l'Afrique.

L'influence politique ne doit pas être négligée. Les communautés africaines à l'étranger façonnent des politiques sur la migration, la justice climatique, le commerce et le développement. Mobilisées de manière stratégique, elles peuvent agir comme la voix de l'Afrique dans les fora mondiaux — même en l'absence des dirigeants africains.

Le problème n'est pas un manque de capacités. C'est l'incapacité de l'Afrique à mobiliser ses propres citoyens. L'aide seule ne suffira pas à alimenter la renaissance de l'Afrique. Son avenir réside dans la connexion entre les Africains, chez eux et à l'étranger, et dans la mobilisation de leurs investissements, de leurs compétences et de leur influence culturelle.

L'Afrique n'a pas besoin de réinventer la roue. Elle doit voir sa diaspora non pas comme des étrangers, mais comme des partenaires : investisseurs, innovateurs, diplomates culturels et porte-parole. Les preuves montrent que la famille africaine mondiale est prête. La question est de savoir si l'Afrique est prête à faire le chemin à mi-parcours.

Il est temps d'agir. Avec les bonnes politiques, des structures d'investissement adaptées et des canaux de transfert de connaissances, la diaspora peut devenir le moteur qui propulse la transformation économique et culturelle de l'Afrique. La renaissance de l'Afrique n'attend pas des programmes d'aide, mais ses propres peuples.

L'auteur, le Dr Sunny Ofehe, est assistant exécutif du gouverneur de l'État du Delta pour les relations extérieures et les affaires de la diaspora.

SOURCE DE L'INFORMATION:TRT Afrika
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